Le droit d’accès à l’information publique : Entre Big bang, Méthodologie, Accompagnement et Évaluation
Le droit d’accès à l’information est un droit humain dont il est possible de trouver les premières expressions, sous différentes formes, au sein des législations de plusieurs pays, en particulier, au sein de la loi fondamentale suédoise sur la liberté de la presse Tryckfrihetsförordningen en 1766.
Au lendemain de la deuxième guerre mondiale, la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948, stipule, dans son article 19 : « Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit ».
En 1966, l’article 19 du Pacte international relatif aux Droits Civils et Politiques indique que : « Toute personne a droit à la liberté d’expression ; ce droit comprend la liberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce, sans considération de frontières, sous une forme orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen de son choix.
L’article 10 de la Convention des Nations Unies contre la corruption, ratifiée en 2007, précise que : « Compte tenu de la nécessité de lutter contre la corruption, chaque État Partie prend, conformément aux principes fondamentaux de son droit interne, les mesures nécessaires pour accroître la transparence de son administration publique, y compris en ce qui concerne son organisation, son fonctionnement et ses processus décisionnels s’il y a lieu ».
Quant à lui, le principe 10 de la Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement de 1992 indique que : « La meilleure façon de traiter les questions d’environnement est d’assurer la participation de tous les citoyens concernés, au niveau qui convient. Au niveau national, chaque individu doit avoir dûment accès aux informations relatives à l’environnement que détiennent les autorités publiques, y compris aux informations relatives aux substances et activités dangereuses dans leurs collectivités, et avoir la possibilité de participer aux processus de prise de décision. Les Etats doivent faciliter et encourager la sensibilisation et la participation du public en mettant les informations à la disposition de celui-ci. Un accès effectif à des actions judiciaires et administratives, notamment des réparations et des recours, doit être assuré ».
Il a fallu attendre le début des années 80 pour que des pays comme le Danemark, la Finlande, la France, les Pays-Bas ou les États-Unis se dotent de lois modernes sur le sujet.
Le déploiement de ce type de loi requiert méthodologie et ressources.
Au Maroc, la Constitution de 2011 garantit ce droit fondamental, dans son article 27 : « Les citoyennes et les citoyens ont le droit d’accéder à l’information détenue par l’administration publique, les institutions élues et les organismes investis d’une mission de service public. Le droit à l’information ne peut être limité que par la loi, dans le but d’assurer la protection de tout ce qui concerne la défense nationale, la sûreté intérieure et extérieure de l’État, ainsi que la vie privée des personnes, de prévenir l’atteinte aux droits et libertés énoncés dans la présente Constitution et de protéger des sources et des domaines expressément déterminés par la loi ».
La loi 31.13, publiée au Bulletin Officiel du 12 mars 2018 et entrée en vigueur, pour partie, le 12 mars 2019, vient cadrer les modalités d’exercice de ce droit.
Cette loi devra se déployer au sein d’un écosystème juridique national, en particulier :
La Commission du Droit d’Accès à l’Information (CDAI) a pour mission de travailler, selon l’article 2 de la loi, avec :
Les instances et les institutions prévues dans le Titre 12 de la Constitution (CNDH, Médiateur, HACA, Conseil de la Concurrence, etc…)
A l’instar de beaucoup de grands pays, nous devrons travailler des semaines, des mois et des années pour inscrire ce droit au sein de nos pratiques quotidiennes, et ce, indépendamment de politiques gouvernementales particulières diverses et variées.
En somme, il s’agit de :
Ainsi, nous devons veiller, en particulier, à ce que :
Vous l’aurez compris : Il ne s’agit pas d’un déploiement en big bang, mais, d’une part, d’un accompagnement au changement, méthodologiquement structuré, et d’autre part, d’un mécanisme d’évaluation adapté, lisible et pragmatique. Comme dans beaucoup d’autres domaines, il s’agit plus d’une évolution culturelle des usages que d’une déclinaison froide de la loi. Naturellement, la loi restera notre cadre et notre référence. Nous souhaitons une déclinaison joyeuse de la loi.
Omar SEGHROUCHNI, Président de la CDAI